Quels seront les grands défis de la santé animale en 2025 ? Les conférences de l’Académie Vétérinaire de France promettent des réponses passionnantes sur des thématiques brûlantes. Entre épidémies animales, recherche scientifique et innovations, ces séances mettent en lumière des problèmes de santé publique et animale d’une ampleur inédite.
Une épidémiologie sous tension : L’urgence des maladies virales
Un point sur la FCO et la MHE en Europe : une menace qui persiste
Lors de la séance publique du 23 janvier 2025, Stéphan Zientara, expert en santé animale, a mis en évidence la progression alarmante des virus de la fièvre catarrhale ovine (FCO) et de la maladie hémorragique épizootique (MHE) en France et en Europe.
En 2023, la découverte d’un variant pathogène du sérotype 8 de la FCO dans l’Aveyron a suscité des inquiétudes majeures, en raison de son impact potentiel sur les économies locales dépendantes de l’élevage ovin et des pertes significatives dans les cheptels touchés.
En 2024, le sérotype 3 s’est étendu jusqu’à l’Europe du Nord, touchant également le Portugal, l’Espagne et la Grèce. Selon academie-veterinaire-defrance.org, ces maladies à déclaration obligatoire restent un défi sanitaire colossal, dû en grande partie à leur transmission par les moucherons Culicoides.
« La récente détection du sérotype 12 aux Pays-Bas en octobre 2024 illustre l’imprévisibilité des émergences virales et leur capacité à se propager rapidement dans un environnement globalisé« , souligne Stéphan Zientara.
Ces émergences mettent en lumière l’importance de réseaux de surveillance renforcés et d’outils de diagnostic adaptés.
ARN et virus : une plongée au cœur de la biologie
Des virus ARN enveloppés et les origines de la vie
Bertrand Saunier, chercheur à l’Institut Pasteur, a proposé une conférence fascinante sur les virus à ARN enveloppés, dont l’impact sur la santé humaine et animale est considérable. Ces virus, tels que le SARS-CoV-2 ou le phlebovirus de la fièvre de la Vallée du Rift, exploitent des mécanismes complexes pour infecter leurs hôtes.
Les recherches de Saunier sur la phylogénie des Flaviviridae révèlent des écarts structurels étonnants, qui compliquent la surveillance des mutations virales. Ces écarts pourraient favoriser l’émergence de nouvelles infections, impactant ainsi la santé publique et animale par des pandémies difficiles à prédire ou à contrôler.
Les traces génétiques retrouvées chez des hôtes ancestraux font remonter l’origine de ces virus à plusieurs centaines de millions d’années. Cependant, ces divergences posent un obstacle à la prévention des émergences futures.
« Face à de telles mutations imprévisibles, la priorité réside dans l’action précoce et la détection rapide des foyers d’infection« , plaide Saunier.
Ce focus met en évidence la nécessité d’intégrer la biologie structurale à la lutte contre les pandémies.
Abeilles et intoxications : des défis complexes pour les cliniciens
Comprendre les facteurs de stress multifactoriels des colonies
Les abeilles, sentinelles essentielles de nos écosystèmes, sont confrontées à des stress cumulés, comme l’a expliqué Lionel Grisot dans sa présentation sur les intoxications subaiguës et chroniques des ruchers.
Par exemple, une baisse de 30 % des colonies dans certaines régions a été liée à des co-expositions à des parasites et des pesticides, causant des pertes économiques significatives pour les apiculteurs et compromettant la pollinisation de nombreuses cultures.
Les interactions entre parasites, virus, contaminants environnementaux et pratiques apicoles créent une synergie qui affaiblit les colonies. Ces co-expositions rendent les diagnostics cliniques difficiles et soulignent la nécessité d’outils toxicologiques avancés pour mieux comprendre les causes précises des décès massifs.
« Les erreurs de diagnostic peuvent avoir des conséquences dévastatrices, soulignant l’importance d’approches multidimensionnelles pour identifier les causes sous-jacentes« , précise Lionel Grisot.
Cette présentation révèle un besoin urgent d’innovations en médecine apicole pour préserver ces pollinisateurs cruciaux.
Arthrose canine et féline : entre pharmacologie et nutraceutiques
Une gestion proactive pour améliorer la qualité de vie des animaux de compagnie
Le Dr Eric Troncy a présenté une méta-analyse sur les traitements de l’arthrose canine et féline, une affection qui touche jusqu’à 20 % des animaux de compagnie, limitant leur mobilité et impactant considérablement leur qualité de vie.
Ce problème de santé est particulièrement préoccupant pour les chiens de grande taille et les chats âgés, souvent plus vulnérables. Si les anti-inflammatoires non stéroïdiens restent une solution courante, leurs effets secondaires et leurs limites soulignent l’intérêt croissant pour les nutraceutiques.
Les suppléments alimentaires enrichis, bien que populaires, manquent encore de preuves solides pour étayer leur efficacité. Troncy appelle à une utilisation raisonnée de ces produits, basée sur des évidences scientifiques récentes, tout en insistant sur le besoin de recherches approfondies pour confirmer leur impact sur la gestion de l’arthrose canine et féline.
« Une approche préventive et proactive de l’arthrose pourrait transformer la vie des animaux et réduire leur souffrance à long terme« , conclut Troncy.
Ces travaux rappellent l’importance d’investir dans des recherches approfondies pour développer des solutions durables.
Une réflexion nécessaire pour le futur
Les thématiques abordées lors des séances de l’Académie Vétérinaire de France montrent que les enjeux de santé animale et environnementale sont intimement liés. Face à l’émergence de nouvelles maladies et à l’érosion des écosystèmes, il devient clair que la science doit s’inscrire dans une démarche proactive et collaborative.
En réunissant des experts de divers domaines, ces conférences ouvrent la voie à des solutions innovantes et adaptées à ces défis contemporains.